Ethique: le Pr Elie Cogan et le Dr Charles Chatzopoulos dénoncent les abus en médecine et en chirurgie

Lors du 20e Colloque d’Ethique du CHIREC le mois dernier, le Pr Elie Cogan, Pr émérite de Médecine interne et Coordinateur de la Recherche Clinique au CHIREC et le Dr Charles Chatzopoulos, urologue et chef du pôle viscéral au CHIREC – site Delta, ont dénoncé les abus que l’on peut rencontrer respectivement en médecine suite notamment à des diagnostics non fondés, et en chirurgie,  même si la grande majorité des médecins sont des gens consciencieux. Retour sur quelques éléments importants de leurs présentations.

« Certains médecins ont tendance à diagnostiquer des maladies sur des bases non fondées et à traiter ces patients de manière inappropriée », a souligné le Pr Cogan d’emblée. Et de citer comme exemple le cas de l’hypothyroïdie. « Faisant fi des recommandations de toutes les sociétés scientifiques, certains praticiens s’appuient sur le dosage des hormones thyroïdiennes urinaires que pratiquent à tort quelques laboratoires pour confirmer une hypothèse diagnostique d’hypothyroïdie infondée .»

En plus de cela, un vent pseudoscientifique soufflant sur ces praticiens a incité ces soi-disant experts à dresser des listes de symptômes sensés permettre un diagnostic sur la seule base clinique. « Ces listes ne sont malheureusement que des compilations de symptômes parfaitement non spécifiques. Le drame est qu’en plus de cela, il arrive que soient proposés à ces patients qui n’ont pas besoin des traitements douteux et coûteux pour les patients car non remboursés par la Sécurité sociale », a déploré le Pr Cogan.

Dans certaines situations, on peut aussi invoquer parmi les causes possibles d’abus diagnostique le manque ou l’insuffisance de preuves clairement établies ou de consensus concernant la meilleure pratique. Cette situation laisse la porte ouverte à des pratiques parfois excessives. Il ne faut pas ignorer non plus l’existence de pressions exercées sur le médecin hospitalier. Ces pressions concernant la productivité ou l’efficacité peuvent avoir une influence sur ses choix des méthodes diagnostiques, même si cela ne devrait pas être le cas.

Abus également en chirurgie
De son côté, le Dr Chatzopoulos a évoqué quatre types d’abus possibles en chirurgie.

Premièrement, l’urologue a pointé les indications chirurgicales, comme en témoignent les variations géographiques du taux de recours à certaines interventions. « La meilleure façon de limiter cette variabilité est de suivre les guidelines spécifiques.».

Deuxièmement, Charles Chatzopoulos a souligné les problèmes d’exécution, que ce soit par défaut de compétence (formation spécifique en fonction du type d’intervention) ou par erreur (mauvais patients, mauvais côté, etc).

« Pour limiter ce risque au maximum, plusieurs outils sont à notre disposition pour améliorer la compétence : formation complémentaire pour certaines opérations, formation continue, concertations multidisciplinaires, etc. Et pour se prémunir du risque d’erreur, il faut suivre de façon systématique les procédures de contrôle (check-list au bloc opératoire, par exemple) », a-t-il commenté.

Troisièmement, l’urologue a relevé la problématique liée à l’information donnée au patient avant une intervention : « Chez nous, la relation médecin/patient est encore fortement basée sur la confiance, contrairement aux pays anglo-saxons où le consentement est systématique. Le patient devrait disposer d’une information écrite avant tout acte chirurgical, et signer un consentement. »

Enfin, le Dr Chatzopoulos a abordé les comportements inadéquats (violence, harcèlement, …), que ce soit entre membres du personnel ou entre patients et soignants. « Ces comportements sont en effet en augmentation, tout comme c’est le cas dans la société. »

Pour conclure, soulignons toutefois que heureusement, la plupart des chirurgiens sont des professionnels consciencieux, que la grande majorité des interventions se passent bien, et qu’il existe des institutions et des dispositions pour éviter les abus.