Un nouveau traitement dans le cadre des troubles dépressifs

Le service de psychiatrie de la Clinique Ste-Anne St-Remi développe, depuis juin dernier, l’utilisation d’un tout nouveau traitement dans le cadre des troubles dépressifs. Il s’agit du Spravato, un dérivé de la kétamine utilisé par voie intra nasale. Un traitement novateur à plus d’un titre qui est également en train de voir le jour à Delta…

Les substances psychédéliques ont été abondamment utilisées en psychiatrie dans les années 50-60 jusqu’à ce qu’elles soient classifiées comme substances dangereuses dans la convention des substances psychotropes de 1971 de l’ONU (1).  Cependant, les études d’addictologie, ont graduellement montré le peu de toxicité de ces différentes substances (2).

Depuis une dizaine d’années, les substances psychédéliques sont à nouveau fort étudiées en psychiatrie. De multiples études sont en train d’être publiées, et montrent l’intérêt potentiel de ces différentes substances dans les dépressions, troubles post-traumatiques et addictions (3). Mais également dans les douleurs chroniques, et les soins palliatifs.

La kétamine, classée quelque peu à part dans les substances psychédéliques suite à son usage en anesthésie, est restée la plus largement utilisée dans certains pays. Son utilité dans la prise en charge des troubles douloureux, et ensuite de la dépression a été largement démontrée (4). L’administration est intra-veineuse, à raison de 0,5 mg/kg, et le rythme d’administration de toutes les semaines puis tous les mois selon les protocoles.

L’eskétamine a ensuite été étudiée, et son utilisation validée dans les dépressions majeures résistantes au traitement. Son efficacité est un peu plus faible que la kétamine (5), mais la voie d’administration est plus facile (intra-nasale). Elle est commercialisée sous le nom de SPRAVATO, et son administration n’est actuellement autorisée qu’en milieu hospitalier. Le rythme d’administration est de deux fois par semaine pendant un mois puis d’une fois par semaine.

Il s’agit d’une grande avancée dans un domaine important et difficile. Les dépressions sont effectivement très fréquentes et il arrive malheureusement souvent qu’elles ne s’améliorent pas après des essais médicamenteux bien conduits. La eskétamine est alors une possibilité tout à fait intéressante, qui permet éventuellement d’éviter le recours au ECT. La mise en place en parallèle d’un suivi psychothérapeutique est évidemment essentielle pour améliorer au mieux l’état de nos patients.

Depuis son autorisation de mise sur le marché en Belgique en juin 2021, le SPRAVATO est utilisé sur le site de Sainte-Anne Saint-Rémi, grâce à une collaboration entre le service de psychiatrie et l’hôpital de jour médical. Son utilisation sur Delta est également en train de voir le jour.

Informations pratiques
Les indications actuelles de SPRAVATO sont les dépressions majeures, non psychotiques et unipolaires, qui n’ont pas répondu à deux antidépresseurs. Le patient ne doit pas présenter d’addictions actives au moment du traitement.

Pendant un mois, le patient recevra le traitement deux fois par semaine. Ensuite le rythme sera diminué à une fois par semaine. Lorsqu’il sera stabilisé il pourra ne plus être administré que deux fois par mois, puis le rythme sera espacé jusqu’à interruption du traitement. Un autre antidépresseur, classique, sera instauré en parallèle pour assurer le traitement de maintenance.

Les effets secondaires les plus fréquents sont de la sédation, un état dissociatif, des troubles de la perception, un mauvais goût dans la bouche, une légère poussée hypertensive, des nausées,…..

La demi-vie de la kétamine est assez courte, environ deux à trois heures, et les effets secondaires ne durent pas au-delà de cette période. L’eskétamine peut également avoir une toxicité vésicale à laquelle il faut être vigilant.

Le SPRAVATO est administré soit durant une hospitalisation, soit en hôpital de jour, pour que le traitement soit supervisé de manière optimale.

Dr Rodolphe van Wijnendaele, psychiatre et référent de ce projet sur Ste-Anne St-Remi, 02/434 27 34
Dr Christian Widakowich, psychiatre et référent de ce projet sur Delta, 02/434 81 04

Des consultations en psychiatrie sont disponibles sur l’ensemble des sites du CHIREC, sur rendez-vous. La Clinique Ste-Anne St-Remi dispose quant à elle d’un service de Psychiatrie proposant un service d’hospitalisation classique et un hôpital de jour.

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1. Nichols DE, Walter H. The History of Psychedelics in Psychiatry. Pharmacopsychiatry. 2021 Jul;54(4):151-166. doi: 10.1055/a-1310-3990. Epub 2020 Dec 7. PMID: 33285579.

2. Johnson M, Richards W, Griffiths R. Human hallucinogen research: guidelines for safety. J Psychopharmacol. 2008 Aug; 22(6):603-20. doi: 10.1177/0269881108093587. Epub 2008 Jul 1. PMID: 18593734; PMCID: PMC3056407.

3. Nutt D. Psychedelic drugs-a new era in psychiatry? Dialogues Clin Neurosci. 2019;21(2):139-147. doi: 10.31887/DCNS.2019.21.2/dnutt. PMID: 31636488; PMCID: PMC6787540.

4. Murrough JW, Iosifescu DV, Chang LC, Al Jurdi RK, Green CE, Perez AM, Iqbal S, Pillemer S, Foulkes A, Shah A, Charney DS, Mathew SJ. Antidepressant efficacy of ketamine in treatment-resistant major depression: a two-site randomized controlled trial. Am J Psychiatry. 2013 Oct; 170(10):1134-42. doi: 10.1176/appi.ajp.2013.13030392. PMID: 23982301; PMCID: PMC3992936.

5. Bahji A, Vazquez GH, Zarate CA Jr. Comparative efficacy of racemic ketamine and esketamine for depression: A systematic review and meta-analysis. J Affect Disord. 2021 Jan 1; 278:542-555. doi: 10.1016/j.jad.2020.09.071. Epub 2020 Sep 23. Erratum in: J Affect Disord. 2020 Nov 20;: PMID: 33022440; PMCID: PMC7704936.